Les grands groupes doivent-ils craindre une pénurie de managers ?
Animation d’équipe, pilotage d’activité, développement des collaborateurs, être au service de l’entreprise mais aussi être à l’écoute, respecter, montrer de l’exemplarité et établir un climat de confiance… le rôle du manager est au cœur d’un écosystème contraint entre les attentes de plus en plus fortes des salariés et les exigences venues de la part des dirigeants.
Aujourd’hui nombreux collaborateurs indiquent ne pas sentir de vocation par un parcours de carrière incluant le management et ceux qui ont se rôle parlent d’une faible reconnaissance de la fonction. Cela peut expliquer la difficulté pour beaucoup d’organisations d’atteindre des niveaux homogènes de motivation et d’engagement au sein de leurs communautés de managers.
Dans ce contexte-là, une question se pose : doivent les grands groupes craindre une pénurie de managers ?
La fonction managériale n’est plus considérée comme une étape incontournable dans l’évolution de la carrière.
Une étude d’Audencia Business School et BVA (2018) montre que déjà à l’époque, et avant le bouleversement du monde du travail imposé par la pandémie COVID-19 seuls 20 % des collaborateurs aspirait à devenir managers.
Les perspectives sur le travail continuent encore évoluer et nous assistons à moins de valorisation du statut de manager comme symbole de réussite et à une priorisation du développement personnel sur l’ascension hiérarchique.
Presque 50% des managers avouent que l’évolution vers cette fonction n’est pas fruit de leurs choix.
L’enquête menée par OpinionWay auprès de 1006 managers français (secteur privé et fonction publique) pour La Maison du Management indique que seulement 54 % des interrogés déclarent être devenus managers par choix.
Nous constatons que malgré les efforts des directions de Ressources Humaines pour diversifier les types de parcours de carrière existants au sein des grands groupes, il existe une difficulté à valoriser les options qui n’incluent pas des rôles de management. Cela pousse des profils pour ce rôle indépendamment de leur intérêt et appétences.
Mais quelles sont les causes de ce désamour ?
1. Manque de formation spécifique pour ce rôle
Une enquête menée par Cadreo, une plateforme de recrutement de cadres et dirigeants, révèle que 40 % des cadres n’ont suivi aucune formation spécifique en management. Cela signifie qu’une majorité de cadres exercent des fonctions de management sans avoir reçu de formation adéquate.
L’étude « Les grandes tendances du management en 2022″réalisé par le CNFCE montre que la formation des managers en France présente certaines lacunes significatives. Environ 42% des managers estiment que leur formation est insuffisante, particulièrement en ce qui concerne les compétences en management et en leadership.
Ces chiffres reflètent une nécessité urgente de développer les compétences managériales pour mieux répondre aux défis contemporains, notamment ceux liés à la transformation numérique et aux nouvelles pratiques de travail.
2. Manque d’animation de la communauté managériale
Le baromètre Alan x Harris Interactive (2023) indique que les managers se sentent souvent isolés et pris entre les demandes des salariés et la pression de la performance.
Dans l’article » Quand les entreprises créent des « communautés managériales » » du site Innovation Manageriale by Francis Boyer il est dit que « Il nous arrive très souvent d’entendre de la part de managers qu’ils n’ont jamais bénéficié d’un accompagnement lors de leur prise de fonction et qu’ils se trouvent parfois désarmés face à des comportements ou des situations inhabituels. » Le manager se retrouve souvent seul à gérer des situations qu’il découvre. Il est légitime de douter sur sa manière de les appréhender et de les gérer.
Dans un contexte de transformation continue et accélérée, il est crucial d’aider les managers à s’approprier une vision et à fédérer les équipes autour de la stratégie.
3. Grande charge mentale et beaucoup de pression
Depuis la crise sanitaire et surtout depuis la normalisation du management à distance avec l’arrivée du télétravail la charge mentale des managers a été encore plus intense. La distance rend encore plus complexe la confrontation aux attentes de performance et bien-être des salariés, l’accumulation des tâches managériales et opérationnelle et les sentiments d’épuisement et de surcharge.
En conclusion et en réponse a notre question initiale, aujourd’hui nous n’avons pas de matière pour affirmer que les grands groupes risquent de d’avoir une pénurie de managers. Néanmoins, ils ont tout intérêt à renforcer ces actions à destination de cette population afin de la former, de la souder, de la motiver et de la reconnaitre à la hauteur de ses responsabilités.
Pour contrer cette tendance assez tendue, il est crucial de réinventer le rôle de manager, de fournir un soutien adéquat aux encadrants actuels et de créer des alternatives valorisantes au sein de l’entreprise. La reconnaissance de l’individualité et la redéfinition des priorités professionnelles jouent un rôle clé dans cette transformation.
Dans les prochains articles nous exploiterons en détail ses pistes d’amélioration, en particulier la formation axe majeur pour ouvrir des pistes enrichissante des parcours de carrière des collaborateurs.